Sacre du printemps chez les mayas
Ars Musica à l’OPRL : création et redécouverte
Sacre mexicain. Les jeudi 1er et vendredi 2 mars, l’Orchestre Philharmonique Royal de Liège fait l’ouverture du Festival Ars Musica avec la redécouverte de La Noche de los Mayas de Silvestre Revueltas, musique de film composée en 1939 : un véritable feu d’artifice qui rappelle Le Sacre du printemps de Stravinsky par sa force rythmique époustouflante (15 percussionnistes !). Cette œuvre mexicaine sera dirigée par un chef vénézuélien, Manuel López Gómez (28 ans). Comme Gustavo Dudamel (directeur musical du Philharmonique de Los Angeles), Domingo Hindoyan (invité régulier de l’OPRL) et 350.000 jeunes Vénézuéliens, il a été formé par « El Sistema », modèle d’éducation musicale nationale.
Arménie, printemps arabe. L’OPRL assure la création de Ayl pour clarinette et orchestre, la cinquième œuvre de Claude Ledoux créée par l’Orchestre depuis 1985. Dans l’esprit du thème d’Ars Musica 2012 dont il est commissaire artistique (« altra cosa » : autre chose, autre cause), Ledoux plonge ici dans les influences arméniennes (les sonorités et mélodies du duduk) et les expressions artistiques du printemps arabe 2011. Ayl est présenté en Dessous des quartes par Claude Ledoux, le jeudi 1er mars à 18h30 (gratuit pour les moins de 26 ans).
En soliste, Jean-Luc Votano, clarinette solo de l’OPRL : à 29 ans, il a notamment créé en Belgique et au Japon le Concerto de Lindberg avec Christian Arming.
Création belge. Bruno Mantovani est un compositeur bien connu de l’OPRL, qui lui a consacré un enregistrement très remarqué avec Finale, Time Stretch et le Concerto pour deux altos (avec Tabea Zimmermann et Antoine Tamestit, direction Pascal Rophé, AEON, 2011). Finale fut composé en 2007 pour le Concours des jeunes chefs d’orchestre de Besançon (d’où son titre). La flûte, omniprésente et virtuose (la référence au Prélude à l’après-midi d’un faune est lointaine mais avouée), lui donne un caractère très rhapsodique et jubilatoire : en création belge ce 2 mars. Signalons qu’à 37 ans, Bruno Mantovani est déjà directeur du Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris.
L’interview de Jean-Luc Votano
Dans Ayl, concerto pour clarinette, Claude Ledoux fait référence à l’Arménie et plus particulièrement au duduk.
Oui, cet instrument à anche double ressemble à un hautbois, mais sa sonorité très chaude et veloutée le rapproche davantage de la clarinette. Claude Ledoux indique dans la partition qu’il faut jouer « comme un instrument ethnique ». Je dois chercher à me rapprocher de la sonorité du duduk, notamment en relâchant l’embouchure de l’instrument, ou en cherchant des doigtés particuliers.
Quel rôle joue la clarinette dans l’œuvre, et quelles spécificités techniques Claude Ledoux exploite-t-il ?
La clarinette est parfois à l’avant-plan, accompagnée par l’orchestre, et parfois elle se fond avec l’ensemble des musiciens. L’écriture est plutôt traditionnelle, même si Claude demande par moments des quarts de ton, ou encore des sons multiphoniques (on produit plusieurs sons simultanément). Nous ne nous sommes pas rencontrés avant qu’il se lance dans la composition de l’œuvre, mais il est lui-même clarinettiste, on sent qu’il connait bien l’instrument même si ce concerto reste l'un des plus ardus pour la clarinette. C’est un très beau concerto, je pense qu’il restera dans le répertoire pour clarinette, au même titre que le Concerto de Lindberg par exemple.
Comment l’œuvre est-elle construite ?
En un seul mouvement, constitué de plusieurs parties dont les transitions ne se remarquent pas. Le tempo évolue progressivement, d’abord lent, puis plus agité, puis retour au calme.
En tant que soliste d’un concerto, comment travaille-t-on une œuvre entièrement neuve ?
Après avoir assimilé sa propre partition, il faut se plonger dans la partition d’orchestre, qui est le seul repère dont on dispose, pour comprendre comment l’œuvre est construite, avec qui on interagit, à quel moment…
Une rencontre avec le compositeur avant les premières répétitions est primordiale, afin de mieux cerner ses attentes, ses idées musicales. Le soliste vient avec des propositions pour l’interprétation de certains passages, et le compositeur peut répondre si cela correspond ou non à l’idée qu’il en a. C’est évidemment ce qui rend ce travail passionnant : pouvoir échange avec un compositeur vivant. On rêverait de pouvoir demander à Mozart comment il veut entendre son concerto pour clarinette !
Les artistes
Manuel López Gómez, direction
Né en 1983, à Caracas, Manuel López Gómez commence le violon à six ans et suit le programme éducatif musical « El Sistema » financé par le gouvernement vénézuélien, tout comme son compatriote Domingo Hindoyan. Comme concertmeister de l’Orchestre Symphonique des Jeunes du Venezuela, puis de l’Orchestre des Jeunes de Caracas, il participe à des tournées aux États-Unis, au Chili, en Uruguay, Argentine, Italie, Allemagne et Autriche… Formé à la direction d’orchestre dès 2000 auprès de José Antonio Abreu, fondateur d’« El Sistema », il dirige régulièrement l’Orchestre Symphonique « Simón Bolivar » et l’Orchestre des Jeunes « Teresa Carreño » du Venezuela.
En 2010 et 2011, il a été l’assistant de Gustavo Dudamel à l'Orchestre Philharmonique de Los Angeles (Disney Hall). En 2011, il a fait ses débuts en Suède avec l’Orchestre Symphonique de Göteborg, et en Corée du Sud, avec l’Orchestre Philharmonique de Busan et l’Orchestre Symphonique de Daegu. Demi-finaliste du Concours International de direction d’orchestre « Georg Solti » (Francfort, 2008), il dirige l’OPRL pour la première fois.
Jean-Luc Votano, clarinette
Formé aux Conservatoires de Mons et de Versailles, Jean-Luc Votano remporte en 1999 le Concours A.GI.MUS (Rome). Il est clarinette solo de l’OPRL depuis 2003. Il a été désigné « Jeune Soliste des Radios Francophones Publiques » de l’année 2004. Il a enregistré les Concertos de Mozart, Weber et Rossini avec l’OPRL et Louis Langrée (Cypres), et des œuvres de Max Bruch avec l’altiste Arnaud Thorette, avec l’OPRL dirigé par Pascal Rophé (Cypres, Diapason d’or). Professeur de clarinette à l’IMEP (Namur), il forme avec ses collègues Sébastien Guedj et Joanie Carlier le Trio Abocalips. Avec Louis Langrée et Christian Arming, il a joué en soliste à New York et Tokyo. À la Salle Philharmonique, il a joué les Concertos de Mozart (2006), Weber (2006), Lindberg (2008), Bruch (2008), ainsi que la Rhapsodie pour clarinette de Debussy avec l’OPRL et Louis Langrée.
Infos : +32 (0)4 220 00 00
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